Le dictionnaire des déportés du camp de Dora, un projet mené depuis plus de 20 ans par ” La Coupole” est paru.
Voir ICI un lien permettant de découvrir le documentaire plein d’émotion qui présente le dictionnaire. Cette présentation a été réalisée par le petit fils de Joseph Jabinzeck, déporté à Dora et journaliste photographe.
Je m’appelle François Jazbinsek. Je suis né en 1922. J’ai été déporté au camp de concentration nazi de Mittelbau-Dora durant la seconde guerre mondiale. Je suis mort en déportation avant d’avoir atteint les 22 ans. Mon frère Joseph quant à lui a survécu à cet enfer. Aujourd’hui, ce n’est pas seulement notre histoire que je vais vous raconter mais celle des 9000 déportés du camp de concentration de Mittelbau-Dora.
Cet ouvrage fixera sur le papier l’histoire d’un pan entier de la déportation dans toutes ses composantes, ses diversités sa complexité et sa pluralité.
L’ouvrage, ” un pont entre les générations”, répond à trois objectifs :
Mémoriel: garder une trace de chacun des déportés de Mittelbau-Dora
Scientifique : accroître nos connaissances sur les phénomènes de violence de masse
Pédagogique: Fournir un outil aux enseignants pour transmettre la mémoire et l’histoire de victimes du nazisme
Dans le cadre de son partenariat avec la Fondation pour la Mémoire de la Déportation et “Les amis de la Fondation pour la Mémoire de la Déportation, à l’occasion du 75ème anniversaire de la libération des camps, le CESE accueille du 14 au 25 septembre l’exposition “La fin du système concentrationnaire : le retour à la liberté des déportés” réalisée par la Fondation pour la Mémoire de la Déportation et l’Association des Amis de la Fondation.
Le retour des déportés des camps de concentration en
avril et mai 1945 a été précédé
d’événements douloureux, liés à la désintégration progressive de l’État
national-socialiste allemand et de son système concentrationnaire, à mesure de
la progression des armées libératrices à l’Est et à l’Ouest. Cette exposition
retrace les grandes lignes des événements intervenus au printemps 1945.
Elle
rappelle que l’énorme machine concentrationnaire d’exploitation, de déchéance
humaine et de mort a continué à fonctionner jusqu’à l’arrivée ou à l’imminence
d’arrivée des armées alliées, malgré la désintégration progressive des
structures de commandement du Reich et de la SS, que des crimes ont accompagnée
jusqu’au bout.
Elle jette également un regard sur les
structures clandestines interne de résistance des détenus et leur rôle dans
ces semaines décisives, marquées à la fois par un immense espoir et une
angoisse insoutenable de ne pas survivre jusqu’à la délivrance finale.
Elle rend compte enfin de l’extrême
complexité des retours et des difficultés d’accueil et de réinsertion qu’ont
rencontrées ces hommes, ces femmes et ces enfants revenu(e)s d’un monde que
leur entourage ne pouvait pas ou ne voulait pas comprendre.
Une initiative autour de l’exposition est prévue le 23
septembre à partir de 17h30 au CESE.
2 sujets y seront notamment abordés :
l’état sanitaire des déportés à
leur retour, par
les médecins de la commission médico-sociale de la FMD
A retenir aussi la date du 24 septembre, toujours dans le cadre de ce partenariat, le CESE accueillera la Journée d’étude sur la thématique “Femmes dans la déportation”: transmettre d’hier à aujourd’hui. Actualités de la recherche, histoires singulières et défis contemporains des femmes dans la déportation”. et le lancement de l’ouvrage Le Livre des 9 000 déportés de France à Mittelbau-Dora, camp de concentration et d’extermination par le travail” (Editions Le Cherche midi).
Renseignements à venir
Si vous êtes à Lille ou dans sa région, du 11 septembre au 27 novembre, vous pourrez découvrir l’exposition : « Ombres et Lumière, Lille-Fives 11 septembre 1942 : histoire d’un sauvetage » au Musée de la Résistance de Bondues 59910. Avenue du Gal de Gaulle
L’exposition Exposition « Ombres Et Lumière, Lille-fives 11 Septembre 1942 : Histoire D’un Sauvetage » .
Le 11 septembre 1942, de nombreuses familles
juives du Nord et du Pas-de-Calais sont arrêtées au petit matin par les soldats
allemands et regroupées à la gare de Fives à destination du camp de
regroupement de Malines, puis d’Auschwitz. Dans l’état actuel des recherches,
496 juifs du Nord et du Pas-de-Calais ont réalisé ce sinistre périple décidé
par les troupes d’occupation. Seuls 15 en reviendront.
Mais grâce à l’héroïsme de certains
(cheminots ou infirmières, communistes ou gaullistes, protestants, catholiques
ou juifs, policiers ou fonctionnaires d’état-civil, directrices d’internat,
etc.), de nombreux juifs purent être sauvés à la gare de Fives (60 selon les
témoignages dont 41 identifiés à ce jour), en majorité des enfants. Ceci
constitue d’après Serge Klarsfeld le plus grand sauvetage de juifs en partance
pour Auschwitz.
L’exposition est réalisée par l’association « Lille-Fives 1942 » avec le soutien de « Rails & Histoire », association pour l’histoire des chemins de fer et l’Association des Professeurs d’Histoire et Géographie (APGH).
Pourquoi le choix de ce site ? La construction du camp
En septembre 1938, le commandement SS du Reich
acquiert, à 20 km au SE de Hambourg, sur la rive droite de l’Elbe, dans une
plaine marécageuse aux hivers très froids et aux étés chauds et humides, mais
au sous-sol riche en argile, une briqueterie non exploitée depuis des années
ainsi que les terrains avoisinants, soit plus de 50 ha. L’idée est de « produire à peu de frais un matériau
réfractaire de première qualité en faisant travailler tous ces fainéants qui se
trouvent dans nos camps de concentration… Ce fait ne devrait pas être sans
intérêt pour vous-même et pour les administrations des travaux publics de
Hambourg » Oswald Pohl, chef d’administration SS, au ministre DR Hans
Nieland (Archives municipales de Hambourg StA HH, Finanzdeputation IV, DV III
C3v, VIIIB2)
En décembre 1938, une centaine de détenus de droit commun du camp de Sachsenhausen sont transférés sur le site de Neuengamme (il était alors considéré comme « camp de travail ») pour y construire un nouveau camp de concentration et remettre en état l’ancienne briqueterie. La ville de Hambourg et l’entreprise Deutsche Erd-und- Steinwerke passent un contrat : la ville accorde un million de Reichsmarks, installera une liaison ferroviaire et aménagera le bras de l’Elbe, la SS fournira gratuitement la main d’œuvre concentrationnaire pour la réalisation de ces travaux. L’objectif est de contribuer à la réalisation d’une partie du grand projet architectural qui sert de propagande au régime ; ce sera « une porte ouverte sur le monde, […] une vitrine des réalisations nazies. » (sources : site de l’Amicale de Neuengamme et de ses Kommandos et KZ-Gedenkstätte-Neuengamme.
Travaux de terrassement à la rivière Dove-Elbe; au 1er plan, la pelle à la main, Salo Blecher Photo de la SS 1941-42 (NIOD 244F/82867) Crédits: KZ-Gedenkstätte-Neuengamme Les SS installent le camp sur le site de l’ancienne briqueterie désaffectée et y font construire la nouvelle usine. Wagonnets devant la rampe de l’ancienne briqueterie. Crédits KZ-Gedenkstaette Neuengamme, 2009 (Ang 2014-541)
En 1940, Neuengamme devient un camp autonome qui dépend de l’Inspection des Camps de Concentration (IKL) ; il y a alors 1 000 détenus. Avec la guerre et l’occupation de l’Europe, ce nombre augmentant vite, ateliers et usines sont construits dans l’enceinte du camp. Les Français arrivent en grand nombre en 1944.
Vue depuis le mirador sur l’ancien site du camp de concentration de Neuengamme : les baraques d’hébergement, la place d’appel et au fond la cheminée du crématoire, mis en service en mai 1942. Crédits : 25e bataillon belge de fusiliers à Neuengamme, 1945 (ANg 2004-795)
Les méthodes du système concentrationnaire… à Neuengamme, comme celles de tous les camps
Ce dessin de Pierre Fertil illustre la solidarité entre les déportés, une des conditions essentielles pour survivre (voir explications et crédits à la fin de cette note)
« Le camp
de Neuengamme partage de nombreuses caractéristiques avec les autres camps
nazis. Au travail forcé et à l’insuffisance de nourriture qui devaient limiter
la survie du déporté à 9 mois en moyenne, s’ajoutaient la volonté de
déshumanisation arbitraire, les exécutions sommaires, les sévices de toute
sorte, les appels interminables… » Extrait du mot de bienvenue du
Président de l’Amicale, Jean-Michel Clère, à l’occasion de l’ouverture du
nouveau site internet de l’Amicale de Neuengamme.
Un camp malheureusement comme les autres, donc qui exécute, déshumanise : ceci est décrit avec précision sur le site de la Gedenkstaette dans l’onglet « historique » ICI qui renseigne sur le quotidien des déportés, leur travail, les gardes SS et la fin du camp avec des photos prises par les SS en 1941, 1942, 1944.
Le camp en 1948 À l’intérieur du camp : ancienne baraque de désinfection (« bains-douches des détenus »), cachot, baraque des cuisines ; au fond à gauche, le bâtiment en pierre pour l’hébergement des déportés, encore en place aujourd’hui. Crédits: Reiner Rump, avant la démolition des baraques en 1948 (Ang 2011-73)
Ils étaient à Neuengamme et beaucoup y ont laissé leur vie
Année
Fév 1940
Fév 1941
Fin 1942
Mi-1943
Fin 1943
Fin 1944
Mars 1945
Avril 1945
Nombre de déportés
2 900
4 500
9 500 (dont 58 000 au camp central)
49 000 (dont 10 000 au camp central)
40 393 (dont 12 000 au camp central)
100 000
enregistrés
dont
nombre de femmes
10 000
11 768
Plus de
13 000
enregistrées
nombre de décès
432
491
3 083
(10%mois)
3 991
5 692
6 224 au cours 1er trimestre 1945
Environ 2000/mois (6 derniers mois)
Au moins 42 900 personnes ont perdu la vie à
Neuengamme dont environ 14 000 au camp central et au moins 12 800
dans plus de 80 Kommandos extérieurs. Au moins 19 100 ont succombé
dans les dernières semaines (évacuations, bombardements, tragédie de la baie de
Lubeck…)
Registre des morts tenu à l’infirmerie-mouroir du camp central de Neuengamme 26/03/1943 (Ang 1996-491) Crédits
Les Kommandos
Comme le montre ce tableau ci-dessus, les détenus
sont de plus en plus nombreux après 1942 et surtout 1944. Des ateliers et
usines sont construits dans l’enceinte du camp ainsi que des bâtiments pour
loger les déportés et 84 Kommandos extérieurs sont créés dont 20
réservés aux femmes, 8 étant situés dans la ville de Hambourg : il faut
répondre aux besoins de l’économie de guerre, déminer les bombes réparer les
routes et les voies ferrées.
Les conditions de travail, de logement, et de terreur des SS ont déterminé les conditions de vie. Les plus grands camps satellites sont ceux de Brême-Farge, créé en octobre 1943 (avec les 3 000 détenus et 7 000 travailleurs forcés étrangers, prisonniers de guerre et prisonniers d’un « camp d’éducation ouvrière » il construisit un bunker sous-marin) et de Salzgitter-Drütte créé en octobre 1942 et qui compta jusqu’à 3 000 hommes contraints de travailler dans la production de grenades pour les usines Hermann Göring.
En zoomant, cette carte permet de situer les Kommandos
(hommes et femmes) y compris ceux inclus dans la ville de Hambourg.
Certains sont très éloignés du camp central comme
celui d’Aurigny, créé en mars 1943 et placé sous l’autorité administrative de
Neuengamme. Il est affecté à la construction de fortifications sur cette île
anglo-normande occupée.
D’autres « centres extérieurs » dépendent du camp de Neuengamme et se trouvent dans la ville de Hambourg. Le zoom de la carte permet de les situer dans la ville. La direction du complexe pénitentiaire de Fuhlsbüttel est transférée à la SS en 1933 ; il devient un camp de concentration et incarne la terreur la souffrance et la mort. D’octobre 1944 à mai 1945, la SS utilise une partie du bâtiment comme détachement extérieur du camp de concentration de Neuengamme. Plus de 200 déportés originaires de 10 pays y meurent des suites des traitements inhumains. Le 21 avril 1945, les SS transfèrent 58 hommes et 13 femmes au camp central et les exécutent
Assassinats d’enfants juifs dans l’école de Bullenhuser Damm
Dans le camp central, le médecin SS Kurt Heißmeyer pratique sur des déportés des expériences médicales relatives à la tuberculose. En novembre 1944, il a fait venir du camp de concentration d’Auschwitz dix filles et dix garçons âgés de cinq à douze ans. Les enfants sont encadrés par deux médecins français et deux soignants néerlandais, déportés pour faits de résistance. Afin de dissimuler ces actes criminels, quelques jours avant la fin de la guerre, ils sont conduits dans une école utilisée comme détachement extérieur du camp et située dans la rue Bullenhuser Damm dans le quartier dévasté de Rothenburgsort. Les vingt enfants sont assassinés avec leurs 4 accompagnateurs ‒ dont deux médecins français, le professeur Florence de Lyon et le docteur Quenouille de Villeneuve-Saint-Georges ‒ dans la nuit du 20 avril 1945. Le médecin SS Trzebinski a exposé au procès de Neuengamme comment les vingt enfants avaient été drogués puis pendus à des tuyaux dans les caves de l’école par les SS. Au cours de la même nuit y sont également pendus au moins 24 déportés soviétiques. Aucun corps n’a été retrouvé.
De septembre 1944 à mai 1945 est
implanté dans le quartier Sasel de Hambourg un détachement extérieur du camp de concentration de Neuengamme. Environ 500 femmes, en majorité juives,
provenant du ghetto de Lodz, transportées à Sasel via le camp de concentration
d’Auschwitz, sont affectées à des travaux de déblaiement dans le centre-ville
de Hambourg ainsi qu’à la construction d’un baraquement dans le quartier Poppenbüttel. Les détenues
affaiblies et affamées doivent accomplir des travaux exténuants. Un grand
nombre d’entre elles meurent de sévices, d’épuisement ou de maladie.
Pour aller plus loin sur ces 84 Kommandos, le site KZ-Gedenkstätte-Neuengamme (ICI) fournit la liste des Kommandos, hommes et femmes, avec leur situation, leur historique, leur production. On peut aussi consulter la rubrique « librairie » du site de l’Amicale (ICI) qui propose des dossiers spécifiques de beaucoup de Kommandos.
Parmi les caractéristiques du camp de Neuengamme, il faut citer les « Ducancé ».
Dans sa chronologie du camp, le site KZ-Gedenkstätte-Neuengamme évoque, à la fin du mois de juillet 1944, l’aménagement d’un « camp de proéminents » pour les « détenus spéciaux » français. La revue Mémoire vivante (n° 68 de mars 2011) consacre un dossier à ce camp, celui des ” Ducancé ” (car internés à Compiègne au camp « C »), des ” déportés de marque”. Ces 366 détenus, dont les 2/3 sont arrêtés entre le 6 et le 11 juin 1944, ‒ la corrélation avec les opérations en Normandie est évidente ‒ sont envoyés à Neuengamme en juillet 1944, dans des conditions moins mauvaises que les détenus « ordinaires ». Beaucoup d’entre eux sont des résistants ‒ 1/4 fait partie d’un réseau ou d’un mouvement de résistance ‒ ou des opposants au régime allemand, ils ont un statut social : cadres supérieurs, magistrats, professeurs d’Université, élus ‒ 23 maires, l’ancien Président du Conseil, Albert Sarrault et l’ancien ministre Henri Maupoil ‒ qui fait d’eux une monnaie d’échange pour les nazis. À Neuengamme, leurs conditions de détention n’ont rien à voir avec celles des autres détenus : un appel moins matinal et moins long, pas de travail forcé, ils organisent même des activités intellectuelles pour combattre l’oisiveté. La Croix-Rouge basée à Hambourg obtient leur évacuation le 12 avril 1945. Leur périple indiqué sur le croquis ci-dessous ( sourceet crédits, Mémoire Vivante, FMD, page 7) les conduit à Brézany le 1er mai, non loin de Prague.
D’après Mémoire Vivante, il semblerait qu’en réalité, les ” Ducancé ” soient passés près de leur assassinat collectif, pensé dès leur départ de Neuengamme, d’après des papiers découverts sur le corps d’un des Allemands tués lors de l’attaque de sa voiture par des maquisards tchèques. Toujours d’après cette source, l’évacuation des ” Ducancé” de Neuengamme et leur vie sauve jusqu’à leur retour correspondent donc à ” une succession d’événements inattendus dont la désorganisation et l’agonie des forces allemandes sont sans doute à l’origine “. Et de conclure, “ leur exécution en mai 1945 en aurait peut être fait des martyrs; leur libération en fait des marginaux de la répression nazie”. En effet, les ” Ducancé ” souffrent de la comparaison avec les autres déportés : 15 seulement (sur les 366) ne sont pas revenus; on est loin des chiffres des déportés passés au camp central et dans les Kommandos. Il n’est pas question ici de trancher le débat entre ceux qui ne comprennent pas ” l’oubli” des déportés du “Camp C” dans les listes du Mémorial et ceux qui estiment qu’ils ne “ partagent pas les mêmes souvenirs que les autres déportés”. Laissons la conclusion au 1er président de l’Amicale, Marcel Prenant, qui les appelle ” déportés de marque“, ce qui rend bien compte des singularités des “Ducancé”.
Elles commencent à la fin du mois de mars par l’évacuation des Kommandos extérieurs vers Bergen-Belsen et se prolongent jusque mi-avril. Elles sont marquées d’épisodes tragiques comme le massacre de Gardelegen le 13 avril de plus de 1 000 détenus venus du camp de Dora et des camps extérieurs de Neuengamme, évoqué sur ce site dans la note Ici, alors que les bombardements s’intensifient et que les Alliés progressent, resserrant l’étau. Ainsi, le 8 avril, un convoi de déportés provenant du Kommando de Salzgitter subit à Celle un bombardement suivi de massacres : plus de 2 000 déportés y trouvent la mort.
La progression des forces britanniques, début avril 1945, oblige à détourner les convois destinés à Bergen-Belsen vers Sandbostel et Wöbbelin pour les déportés provenant de Kaltenkirchen, Porta Westfalica (voir le site KZ-Gedenkstätte-Neuengamme, ICI), Schandelah, Fallersleben et Helmstedt-Beedorf (voir le dossier n° 2, sur le Kommando de Fallersleben, disponible sur le site de l’Amicale), entre le 12 et le 19 avril. Ces deux camps ne sont ni équipés, ni préparés à recevoir une telle masse de détenus. Ils se transforment rapidement en mouroirs dans lesquels des milliers de personnes meurent de faim et de maladie. On ne connaît pas le nombre de détenus de Neuengamme qui périrent dans ces “mouroirs”(source Kz- Gedenkstaette Neuengamme editions Temmen)
Dessin de Pierre Fertil
Depuis mars 1945, Neuengamme était le point de regroupement pour tous les Norvégiens et Danois prisonniers en Allemagne, résultat d’une concession de Himmler au vice-président de la Croix-Rouge suédoise, le comte Folke Bernadotte (Himmler, voulant négocier un armistice avec le gouvernement britannique, espérait un contact avec eux par l’intermédiaire du diplomate suédois). C’est ainsi que plus de 4 000 prisonniers scandinaves (dont 1 200 détenus norvégiens et danois) sont évacués le 20 avril : c’est l’opération « bus blancs ».
Évacuation des déportés scandinaves à bord de bus de la Croix-Rouge Photographe inconnu 1945 (MDF Gr;31.8309) CréditsKZ-Gedenkstätte-Neuengamme
L’ordre d’évacuation du camp central est donné le 19 avril. La SS fait alors disparaître les traces de ses crimes : les dossiers sont brûlés, les baraques nettoyées et les instruments de supplice détruits. C’est dans ce contexte que se situent les crimes relatés plus haut : exécutions des enfants et des déportés soviétiques de la rue Bullenhuser Damm et de 58 hommes et 13 femmes transférés de Fuhlsbüttel .
Plus de 9 000 déportés sont acheminés jusqu’au port de Lübeck dans des wagons de marchandises.
La tragédie de Lübeck
Comme il n’y avait plus de camps pour recevoir les détenus, des bateaux sont réquisitionnés pour embarquer plus de 9 000 détenus. Du 19 au 26 avril, quinze trains les transportent vers le port de Neustadt où la marine allemande posséde une importante base sous-marine. Les détenus sont répartis à bord de trois navires ancrés au large : le paquebot de croisière « Cap Arcona » (4 500 détenus) et les cargos « Thielbek » (2 800 détenus) et « Athen » (2 000 détenus). Le 30 avril, la Croix-Rouge suédoise réussit à en faire libérer 400, (Français, Belges et Hollandais), parmi lesquels des femmes de Ravensbrück et un groupe d’hommes provenant de Dora qui sont emmenés par bateau en Suède le 2 mai 1945. Les autres prennent la mer avec leur chargement de déportés, arborant le pavillon à croix gammée soit, d’après la FMD, « avec l’intention de les faire périr en mer, soit de les “marchander”.
Le 3 mai 1945, en début d’après-midi, l’aviation britannique au cours d’un raid sur Neustadt, destiné à empêcher le repli d’une partie des troupes allemandes par la Baltique, attaque les navires. Le « Cap Arcona » prend feu puis chavire, le “Thielbek” coule en vingt minutes. L’”Athen”, toujours à quai, est épargné (il a hissé des drapeaux blancs). Ce 3 mai 1945, 7 300 déportés périssent dans les eaux glacées de la Baltique ou sont abattus en essayant de se sauver. Quelques-uns, parvenus malgré tout sur les plages, sont alors traqués et mitraillés par les jeunesses hitlériennes ou par des marins. Malgré tout, 350 rescapés du ” Cap Arcona”, dont onze Français et 50 du “Thielbek” dont quatre Français, survécurent au drame. Hambourg capitule. (source FMD)
” Je revois ces torches
incandescentes / Ce feu maudit / Qui fut la dernière tourmente / Mais le Cap
Arcona / Les entrailles tordues / Sombrait amèrement / Dans sa course perdue”.
Le 2 mai, les SS quittent le camp avec les derniers déportés. Les soldats britanniques d’un commando de reconnaissance qui atteignent le camp le soir même signalent, après une première visite, que le camp est vide : Neuengamme devient un « camp méconnu » qui n’a donc pas été « libéré » au sens où nous l’entendons pour les autres camps (Auschwitz, Buchenwald…).
Les derniers déportés sont libérés le 10 mai à Flensbourg sur la Baltique.
Dessin de Pierre Fertil Déportés montrant leur joie à la libération du camp Ce dessin de Pierre Fertil, de Mai 1945, illustre les sentiments contradictoires des déportés à leur libération, libres, mais sans leurs camarades qui ont laissé leur vie à Neuengamme
Après 1945
Tous les renseignements concernant la Mémoire du site de Neungamme sont détaillés sur les pages web de l’Amicale et du portail de la Gedenkstaette. Cette dernière permet de découvrir le Centre de Mémoire de Neuengamme (ICI), un des plus grands d’Allemagne, et les expositions permanentes. Le site internet de l’Amicale de Neuengamme, mis à jour et complété actuellement est accessible ICI
Dès 1953, le président français de l’Amicale
Internationale (AIN) de Neuengamme, Jean-Aimé Dolidier (Mle 31 859), un
survivant de ce camp, fait réaliser une première colonne commémorative sur le
terrain de l’ancien jardin horticole du camp sur lequel les SS faisaient
répandre les cendres de la combustion du four crématoire.
En 1965, fut érigé un autre mémorial se composant d’une stèle, d’un mur du souvenir avec les nationalités gravées en tablette et de la sculpture, « Le détenu agonisant », œuvre d’une ancienne déportée, Françoise Salmon.
Déporté agonisant Crédits: P.Evans, Amicale de Neuengamme
Le nouveau site de l’Amicale, ouvert le 3 mai 2020, date anniversaire de la tragédie de Lübeck, vous donne toutes les informations concernant les déportés, mais aussi les actualités et activités de l’Amicale. Il permet aussi de consulter le « Mémorial », la base de données comportant les noms de plus de 9 700 déportés français, résultat d’un travail de plus de trente ans et régulièrement mis à jour.
Vous trouverez aussi des renseignements sur les pèlerinages : celui de 2020, initialement prévu du 1er au 5 mai, est reporté en 2021 et donc à nouveau remis (de nouvelles dates seront communiquées dès que possible), et le bulletin de N’oublions jamais.
Les
cérémonies prévues pour le 75e anniversaire de
la fin du camp ont été annulées.
« Pour nous, la décision d’annuler les cérémonies commémoratives dans cette année spéciale [due à la crises sanitaire, NDLR] n’a pas été facile à prendre. Mais la santé de nos invités passe en premier. Nous espérons de tout cœur pouvoir renouveler nos invitations l’année prochaine. » (Prof. Detlef Garbe, Directeur du Mémorial du camp de concentration de Neuengamme, Docteur en histoire, Université de Hambourg).
Cependant, la Gedenkstaette a organisé, en comité restreint, une cérémonie dans le camp de Neuengamme. Une gerbe a été déposée au nom de l’Amicale française.
Une gerbe a été déposée au nom de l’Amicale française , Crédits Amicale de Neuengamme
Sur le site web de la Gedenkstätte, treize anciens déportés, des représentants d’associations de prisonniers de nombreux pays, des représentants politiques allemands ainsi que les directeurs de la Fondation des mémoriaux et lieux didactiques de Hambourg et du Mémorial du camp de concentration de Neuengamme répondent à la question : Que signifie pour moi le 75e anniversaire de la libération ? Voir aussi la Page Facebook du Mémorial (ICI). Tous les textes de la commémoration virtuelle qui a eu lieu à l’occasion du 75ème anniversaire de la fin de la guerre et de la libération des camps de concentration sont traduits en français. Ils sont accessibles en cliquant sur ce lien, ICI.
« Nous,
déportés survivants du camp de concentration de Neuengamme et de ses Kommandos,
familles et amis, proclamons notre attachement indéfectible aux valeurs
communes issues de la résistance et de la tragique expérience
concentrationnaire.
Les
années passées depuis la Libération et le décès de nombre d’entre nous n’ont
pas affaibli nos convictions…
… Par tous les moyens dont nous disposerons, nous ferons connaître ce qui s’est passé à Neuengamme et dans ses Kommandos, en particulier auprès des jeunes générations que nous invitons à s’investir à leur tour pour développer cette œuvre de mémoire. »
Né en 1923 en Loire Atlantique, le jeune Pierre Fertil utilise déjà ses talents en dessin pour fabriquer de faux papiers. Il est arrêté lors d’une rafle et déporté à Neuengamme avant de se retrouver au Kommando de Blumenthal et, en avril 1945, à Sandbostel. Le 11 mai 1945, il peut enfin écrire à sa famille: “OUF! Les barbelés n’existent plus. Je n’ai plus cette hantise de la mort….”. Après la guerre, il reprend ses études pour devenir médecin, “subjugué par l’importance des médecins en KL, je décide de faire médecine”. Ses dessins témoignent de sa sensibilité, de son expérience vécue de déporté qui lui permet de montrer les conditions de survie des déportés, tout comme la monstruosité de ses bourreaux. Mais ils témoignent aussi de la capacité de l’être humain à espérer et à garder sa dignité d’Homme. Chacun des dessins de Pierre Fertil est produit selon son inspiration, au gré d’un souvenir, d’une lecture, abouti ou inachevé, “croqué” parfois sur un morceau de papier journal, mais aucun ne laisse indifférent.
(Source,
Archives départementales du Calvados)
Les titres en italique sont ceux mentionnés dans le Cahier des Archives départementales du Calvados. Toutes les reproductions : crédits photographiques, l’Amicale de Neuengamme.
Le camp de Ravensbrück n’a pas été ouvert pour être un camp de femmes. Au début de leur arrivée au pouvoir, les dirigeants nazis n’ont pas conscience de l’influence des femmes dans la lutte contre le régime et son idéologie, mais elles finissent par entrer dans la catégorie des êtres à « éduquer », par être exploitées puis éliminées. Les nazis doivent aussi prendre en main l’éducation des jeunes Allemandes et, pour cela, ils s’inspirent des principes de formation de la SS. Cependant, comme le fait remarquer le numéro 39 de Mémoire Vivante (MV) consacré à ce camp, jamais les responsables SS ne placeront des femmes à la tête d’un camp et la direction de Ravensbrück, comme de ses Kommandos, restera toujours aux mains de SS, organisation nazie uniquement masculine.
Trois femmes avec civière (“Drei Frauen mit Bahre”) von Fritz Cremer Évocation de la présence des enfants Archives fédérales allemandes Cette image a été donnée à Wikimedia Commons par les Archives fédérales allemandes
Le site de Ravensbrück est intéressant pour la SS : constitué de sable et de marais, il est insalubre, isolé, mais à 80 km de Berlin, à 50 d’Oranienburg-Sachsenhausen, siège de l’Inspection générale des camps de Concentration, avec, de plus, une bonne desserte fluviale.
En novembre 1938, 500 détenus du camp de Sachsenhausen commencent, à Ravensbrück, la construction du futur camp pour femmes. Les premiers transports importants d’un millier de détenues et de leurs surveillantes arrivent à la mi-mai 1939. Les effectifs augmentent et s’internationalisent avec la guerre, surtout après 1942, et considérablement en 1944 (presque 22 000 dans la première moitié de l’année, et plus de 48 600 à la fin); en 1945 c’est le chaos avec l’arrivée des détenu(e)s des évacuations des camps de l’Est.
On estime à plus de 132 000 le nombre global de femmes de plus d’une trentaine de nationalités passées à Ravensbrück ; parmi elles également des femmes juives, sintis et roms, ce qui démontre bien le caractère universellement répressif du système concentrationnaire nazi. Le Mémorial de Ravensbrück avance les chiffres de 120 000 femmes et enfants, de 12 000 jeunes femmes passées au camp d’Uckermark et de 20 000 hommes.
Quant au nombre de Françaises déportées de France à Ravensbrück, en l’état de ses recherches, en 2017, la Fondation pour la Mémoire de la Déportation (FMD) estime leur nombre total à environ 7 500 si on ajoute les déportées dans le cadre de la « solution finale ». Il faut aussi y ajouter les 21 bébés nés de Françaises à Ravensbrück et dont seulement trois ont survécu. 1 700 hommes déportés de France ont également transité par le camp ou l’un de ses Kommandos.
Sur ce total des Françaises envoyées à Ravensbrück, 90% sont des résistantes ou opposantes actives, ce qui explique leur sens de l’organisation et leur solidarité pendant ces années. La majorité d’entre elles est partie de Compiègne-Royallieu ou du Fort de Romainville (voir article de ce blog, « hommage aux femmes dans la résistance et la déportation »)
Sur ce plan, on peut voir, depuis la porte du camp qui donne accès à la Lagerplatz (place principale du camp) prolongée par une vaste allée qui sert de lieu de rassemblement pour les appels, les bâtiments de la Kommandantur, et, dominant le mur, la cheminée du crématoire (un 2ème fut achevé pendant l’hiver 1944-45 mais ensuite il fut détérioré par la surchauffe), et la chambre à gaz construite au début de 1945. Le rythme de 150 à 160 mises à mort par jour au printemps de cette année-là a été établi lors du procès des responsables du camp et confirmé par les recherches qui ont suivi (source MV).
On distingue aussi les 35 Blocks, les entrepôts de l’Industriehof (ateliers de récupérations de vêtements militaires appartenant à la SS), les 20 ateliers de l’usine de composants électriques Siemens & Halske, avec son camp annexe de détention, créé à la fin de l’été 1942. On peut aussi voir l’emplacement de la tente de 50 m sur 10 m, dressée pendant l’hiver 1944-45 sur un sol resté sans construction à cause de son humidité et où plus de 3 000 femmes (transférées des camps de l’Est, essentiellement Auschwitz-Birkenau, lors des marches de la mort) furent entassées, parfois avec des enfants, à même le sol, sans couverture, sans eau, ni un minimum de conditions sanitaires, ce qui explique le nombre important de victimes quand elles ne furent pas rapidement transférées vers des camps satellites.
Un camp d’hommes (kleines Männerlager), créé en 1941, servit de réservoir de main d’œuvre pour les agrandissements, mais aussi de camp disciplinaire; 20 à 25 000 détenus y sont passés, mais très peu survécurent.
Un autre camp satellite est construit en 1942 à environ 1,5 km du camp principal, le Judendlager, pour jeunes délinquantes allemandes à « rééduquer » par la terreur et le travail forcé. Il devient l’Uckermark pendant l’hiver 1944-45 et sert de camouflage à des mises à mort collectives ou d’étape vers la chambre à gaz. (Source MV). Les listes de ces mises à mort collectives camouflées sous l’appellation de « transférées au camp de repos de Mittwerda » ont disparu, sauf une (le 6 avril 1945, pour 496 femmes) sauvée par des détenues ; elle confirme que les victimes, surtout des Polonaises et des Juives hongroises, avaient essentiellement plus de 40 ans et avaient survécu à Auschwitz et Majdanek. 8 000 femmes sont passées à Uckermark ; quelques-unes ont pu échapper à leur sort grâce à diverses complicités.
Autour du camp et à proximité du lac, le Schwedtsee, se répartissaient les logements des cadres SS, les casernements de troupes des SS, le tout desservi par un important réseau de voirie.
Ce rouleau compresseur de 1,50 m de diamètre, 3 m de long, et de 800 à 900 kg était traîné par une dizaine de détenues. Photo Amicale de Ravensbrück 2006
Témoignage: « Mais le plus épuisant peut-être [des conditions de travail], c’était le rouleau compresseur… Nous faisions les fondations des routes du camp…en tirant un énorme rouleau de 1,50 mètre de diamètre, 3 mètres de long et qui pesait 8 à 900 kilos. Nous nous attelions à sept ou huit pour le tirer. C’était une vision évoquant l’esclavage assyrien. »
Amicale de Ravensbrück et ADIR : Les Françaises à Ravensbrück, Gallimard, 1965.
Au fur et à mesure que la guerre progresse, le nombre de camps annexes augmente. Parmi eux, en dehors des ateliers et usines de l’Industriehof et de Siemens & Halske, on peut citer des « camps de plein air » (travaux de terrassement, corvées aux cuisines, assèchement des marais…), les Kommandos de « wagonneuses » qui déchargent des wagons de marchandises issues des rapines nazies en Europe occupée (une source de détournements risquée mais utile pour celles dont la vie dépend de tout), le Kommando Beendorf (fabrique de pièces pour moteurs d’avion dans une ancienne mine de sel à 600 m de profondeur, rattaché à Neuengamme car trop éloigné du camp central de Ravensbrück), Torgau (traitement des douilles d’obus usagées), Rechlin (un des sommets de l’horreur), Petit-Königsberg (réparation des pistes d’aviation)… Au total, le camp de Ravensbrück « alimente en main d’œuvre féminine plus d’une cinquantaine de Kommandos extérieurs ou de camps annexes » (MV). Le travail forcé de cette main d’œuvre est très rentable d’autant plus que les entreprises peuvent à tout moment renvoyer les détenues épuisées contre des nouvelles.
Le camp de Ravensbrück « alimente en main d’œuvre féminine plus d’une cinquantaine de Kommandos extérieurs ou de camps annexes » (MV). Crédits photographiques Memoiredesdeportations
Ravensbrück, l’exploitation de la main d’œuvre
” L’arrivée… et 2 heures plus tard” .. Dessins de Violette Lecoq 1945 Crédits photographiques Gedenkstaette “L’appel” Dessin de Violette Lecoq Crédits photographiquesSur l’auteur et ses dessins, voir note en fin d’article
Les conditions de (sur)vie n’ont rien à envier à celles des camps d’hommes, (« peur et affolement quotidien demeurent une constante” MV), mais elles deviennent encore plus pénibles les derniers mois et la mortalité augmente, passant de 24 à 60% de la population globale du camp en 1945 (MV, déposition du médecin-chef de Ravensbrück, le docteur Treite)
“Seau à manger” Ce seau a été utilisé pour transporter les repas des détenus de la cuisine des détenus aux blocs respectifs. Les seaux contenaient souvent de la soupe et avec leur garniture pesaient jusqu’à 50 kg. Les seaux étaient portés sur deux poignées par deux prisonnières souvent mal nourries et affaiblies. Crédits photographiques Dessin de Violette Lecoq “Gastronomie”
Les nouveau-nés étaient, au début, systématiquement étouffés ou noyés. En 1944, les nazis les laissent vivre, mais rien n’est prévu pour les accueillir jusqu’en septembre de cette année avec la création de la Kinderzimmer dans le Block des malades n° 11, mais sans aucun moyen sauf la débrouillardise et la solidarité des détenues. MV évoque le nombre de 600 naissances, mais seulement une quarantaine d’enfants ont quitté le camp en vie et, sur les 21 naissances de Françaises, deux garçons et une fille survécurent. Des témoignages ont attesté de la présence d’enfants au camp, « une horde sauvage et abandonnée » (environ 500 Source MV) victimes aussi des sélections et des transports de la mort. Les nazis pratiquaient aussi des stérilisations sur les femmes et les enfants (les plus jeunes avaient 8 ans).
Complément: ICI “Enfant cachée à Ravensbrück!” Elle avait 4 ans…
Victime polonaise d’expérimentation médicale, octobre-1944 L’utilisation de prisonnières comme cobayes pour des expérimentations pseudo-médicales est évoquée dès l’année 1942. Les survivantes (les Kaninchen, « petits lapins » à cause de leurs béquilles) ne furent sauvées que par la solidarité. Crédits photographiques
Comme dans les autres camps, solidarité et résistance ont aidé à survivre, mais il n’y a pas eu d’organisation structurée avec une direction clandestine car le brassage permanent, dû aux changements fréquents de Blocks, et aux départs vers d’autres camps, ne le permit pas. Cependant, l’action clandestine visait à ” secourir les détenues les plus menacées et les enfants, par divers procédés, dont des substitutions d’identité avec des morts et à saboter la production de guerre allemande en “essayant d’être intelligemment imbéciles et maladroites”, ce que certaines ont payé de leur vie”.
À la mi-janvier 1945, Ravensbrück et ses camps abritaient environ 46 000 détenues et 8 000 hommes, mais les évacuations augmentèrent considérablement, ce nombre provoquant une situation chaotique. Les nazis firent tout pour se débarrasser du plus grand nombre possible de détenues, par des transferts dans d’autres camps, dont ceux de Mauthausen et Bergen-Belsen, fin février-mars 1945, et l’extermination des plus faibles, ce qui donna au camp une allure de camp d’extermination. Bernard Strebel (article memoiredesdeportations) estime que presque la moitié des victimes qui ont péri dans le « complexe de Ravensbrück – exécutions massives comprises – ont trouvé la mort dans les quatre derniers mois. »
Enfin, on avance, le chiffre de 20 000 détenu(e)s encore présent(e)s dans le camp qui sont lancé(e)s dans des “marches de la mort” les 24 et 26 avril (les hommes) et les 27 et 28 avril (les femmes), soit deux jours avant l’arrivée de l’armée soviétique. Le chiffre des victimes de ces ” marches de la mort “, méconnu de façon exacte en l’absence de documents sûrs ( l’ensemble des documents a été détruit par les SS au moment de l’arrivée des alliés), s’ajoute au nombre de victimes.
Les derniers membres de la SS quittent le camp le 29 avril en laissant derrière eux environ 2 000 femmes, hommes et enfants malades ainsi que quelques médecins et infirmières détenues et autres volontaires (parmi lesquels Adélaïde Hautval et Marie-Claude Vaillant-Couturier). Le 30 avril les avant-gardes de la 49e armée du 2e front de Biélorussie pénètrent dans l’allée centrale du camp et le 1er mai des unités régulières libèrent les dernières et derniers détenus de Ravensbrück. (Source FMD)
C’est la fin de l’histoire du principal camp de femmes du système concentrationnaire nazi.
Le nombre total de victimes, toutes causes confondues, se situe autour de 70 000 (Source, Gedenkstätte Ravensbrück)
Le camp et le Mémorial après la libération : Ravensbrück, lieu de mémoire
Sculpture en bronze Tragende de Will Lammert; elle est considérée comme le symbole du Mémorial de Ravensbrück. Pour l’ouverture inaugurale du site du Mémorial national, une version à plus grande échelle de la sculpture Tragende a été créée et exposée. Cette figure symbolique centrale, se dresse au sommet d’une stèle sur la péninsule du lac Schwedtsee. Photo, Amicale de Ravensbrück, 2015
Voir l’historique du Mémorial sur le site de ce dernier ICI
La première commémoration eut lieu en septembre 1948. Crédits photographiques Depuis cette date, des cérémonies ont lieu chaque année.
Des expositions temporaires et permanentes…
Vernisssage de la nouvelle exposition permanente :le camp de concentration pour femmes de Ravensbrück. Histoire et mémoire 21 avril 2013 Crédits photographiques
Les cérémonies du 75e anniversaire de la libération des camps
En raison de la crise sanitaire, les cérémonies et voyages mémoriaux ont été annulés. Des gerbes ont été déposées, des témoignages des représentants des États en hommage aux victimes ont été lus.
L’intervention de Mme Amélie de Montchalin, secrétaire d’Etat aux affaires européennes auprès du Ministre de l’Europe et des Affaires étrangères de la République française pour le 75éme anniversaire de la libération du camp de Ravensbrück est ICI
« Résurrection » : la Rose de Ravensbrück, Une rose pour l’Avenir
« Pour que vive leur
mémoire, plantez, faites planter cette Rose, monument vivant, créée par les survivantes
résistantes déportées, au sein de l’Amicale française de Ravensbrück et des Kommandos
dépendants en 1975. Cette rose porte le message :
« Liberté-Dignité-Vigilance pour un monde en Paix ».
« Elle [La rose de Ravensbrück] vit encore en certains lieux. Elle
a également rejoint la Norvège où des enfants de déportés l’attendaient pour la
replanter sur un lieu maudit, le centre de détention de la Gestapo, devenu un
musée et un mémorial dédié à la Résistance après avoir été un endroit occupé par
les nazis…
Que soient remerciés tous ceux qui participent à cette chaîne d’amitié, mais aussi les agents techniques des jardins et de l’environnement qui, dans les villes, ont aidé à prélever, à planter « Résurrection » pour que « Résurrection » vive et continue à vivre. »
Ces roses portent le message : « Liberté-Dignité-Vigilance pour un monde en Paix ». Photo Amicale de Ravensbrück avril 2015
À propos des Dessins de Violette Lecoq
Agent de renseignement pour la résistance parisienne, Violette Rougier-Lecoq est arrêtée et déportée à Ravensbrück en octobre 1943. Rapatriée en avril 1945 par la Croix-Rouge suédoise, elle revient avec 36 dessins dissimulés avec soin tout au long de sa détention ; en 1948, elle les réunit dans un album, Ravensbrück 36 dessins à la plume : un témoignage accablant de l’horreur des camps et du système concentrationnaire nazi qui sera justement considéré comme tel au procès de Hambourg.Source et crédits photographiques
Pour compléter cet article, se reporter aussi à celui posté le 5 mars sur ce blog, intitulé “Les femmes et la déportation“, consacré à l’opérette de Germaine Tillion
“Le Verfügbar aux enfers est une opérette écrite clandestinement à l’automne 1944 par Germaine Tillion au camp de concentration de Ravensbrück. Ethnologue, elle a réussi à prendre le recul nécessaire pour observer les règles de l’univers concentrationnaire, qu’elle et ses camarades, subissent. Le rire étant la seule arme qui lui reste, elle écrit cette œuvre qui dépeint l’enfer de Ravensbrück.
Le Verfügbar est un animal inconnu, jamais repéré jusque-là, qui ne mange jamais, ne boit que de l’eau sale et est maigre comme un clou. Source réseau Canopé
« Survivre est notre ultime sabotage » Germaine Tillion
Amicale de Ravensbrück, Juin 2017que nous remercions pour l’envoi des documents et photos personnelles
Le Comité de soutien pour la sauvegarde du fort de Romainville a pour objectif de contribuer à prendre les mesures nécessaires pour la création d’un Musée de la Déportation et de la Résistance dédié aux femmes qui aurait toute sa place dans l’enceinte du Fort de Romainville.
Aujourd’hui il n’existe, aucun Centre d’Histoire, ni même de lieu Mémoriel, dédié au rôle irremplaçable des femmes dans la Résistance et la Déportation, en France et en Europe.
Logo du Comité de Soutien du Fort de Romainville
Le camp du Fort de Romainville, premier camp allemand en France, est un haut lieu de la Déportation et de la Résistance, en lien avec le camp de Royallieu à Compiègne. Toutefois, l’histoire du Fort de Romainville sous l’Occupation est aujourd’hui largement oblitérée.
Rappelons qu’une majorité d’internés dans le camp furent des femmes et que près de 40% de femmes déportées dans le cadre de la politique de répression, partirent du fort. Ce qui donne tout son sens à la création d’un /musée dédié aux femmes dans la Résistance et la Déportation, dans l’enceinte du fort.
Dans cette période particulière de confinement puis de dé-confinement et en cette année du 75e anniversaire de la Libération des camps nazis et de la victoire sur le nazisme, nous avons tenu à réaffirmer notre engagement pour ce projet de Mémorial, en déposant des roses devant des plaques à la mémoire de femmes résistantes déportées ou exécutées, le 26 avril, le 8 mai, le 27 mai et le 18 juin
Le 26 avril, dépôt d’une gerbe au pied des plaques à l’entrée du fort de Romainville, à la mémoire des Déportés ; Le 8 mai, dépôt d’une seconde gerbe, à la mémoire des résistants Dépôt d’Un bouquet au gymnase Japy, dans le 11e arrondissement, à la mémoire des enfants, des femmes et des hommes, qui y furent rassemblés avant d’être déportés à Auschwitz
Des roses furent déposées également sous les plaques à la mémoire des femmes résistantes.
Bertie Albrecht (avenue Bertie Albrecht dans le 8e arrondissement) Charlotte Delbo (rue de la Faisanderie, dans le 16ème arrondissement) Danielle Casanova (rue Danielle Casanova dans le 1e arrondissement) France Bloch et Frédéric Sérazin (rue Monticelli dans le 14e arrondissement) Geneviève de Gaulle (allée Geneviève Anthonioz de Gaulle aux Lilas) Lucienne Palluy morte à Auschwitz (Porte de Bagnolet) et Jules Vercruysse Madeleine Passot et Lucien Dorland (5 rue cité Falguière dans le 14e arrondissement) Marie-Claude Vaillant-Couturier et Pierre Villon (Place Marie-Claude Vaillant-Couturier et Pierre Villon dans le 4e arrondissement) Olga Bancic (square Olga Bancic dans le 11e arrondissement) Eugénie-Mélika Djendi, franco-algérienne, opératrice de radio, exécutée à Ravensbrück (square Eugénie Djendi dans le 15e arrondissement) Neus Catala, républicaine espagnole, résistante déportée à Ravensbrück (Allée Neus Catala dans le 11e arrondissement) Maï et Georges Politzer (rue Georges et Maï Politzer dans le 12 arrondissement)
Texte et photos: Yves Jegouzo, Président du Comité de soutien du Fort de Romainville pour la création d’un Mémoriel dédié aux Femmes dans la Résistance et la Déportation Hôtel des Fondations- 30 boulevard des Invalides – 75007 Paris
Nous demandons que :
-La caserne historique et les casemates où furent emprisonnés les résistants hommes et femmes, ainsi que le lieu du massacre de 1944, soient préservés,
-La cour du Fort, ancienne cour des détenue.e.s, soit également conservée dans son périmètre actuel,
-Une partie des bâtiments existants soit utilisée pour la création d’un musée de la résistance des femmes, car il n’existe à ce jour, aucun lieu mémoriel dédié au rôle des femmes dans la résistance, qu’elles soient ou non passées par Romainville
Le 24 janvier 1943, le premier convoi de résistantes et de prisonnières politiques envoyées à Auschwitz, “le convoi des 31 000” est parti de Romainville, avec Charlotte Delbo.
Lise Lesèvre, Renée Rigault, Madeleine Odru,
Anise Postel-Vinay, Denise Vernay, Lise London, Danièle Casanova, Serge
Choumoff, André Biver, Simone Sampaig, Maï Politzer, MarieElisa Nordmann,
Marie-Claude Vaillant-Couturier…
« Et puis je les (les camarades) ai revus à Romainville. Je dois dire que, quand nous nous sommes retrouvés, cela a été le bonheur. Nous n’étions plus seuls. Nous nous sommes entraidées les unes les autres. Il y avait beaucoup de femmes de fusillés. C’était très dur mais chaque fois qu’un mari tombait nous la supportions toutes un peu. La solidarité était parfaite. » Charlotte Delbo
Chacun connaît ce film réalisé par Louis Malle en 1987.
“Au revoir les enfants” Crédits Photos : France Culture Télérama
Derrière ce film, il y a une vraie scène de vie, un souvenir “douloureux”. Le réalisateur est un ancien élève du Père Jacques,au Petit collège d’Avon, prés de Fontainebleau. Julien, dans le film, c’est Louis Malle qui a assisté à la descente d’agents de la Gestapo le 15 janvier 1944 dans son collège et à l’arrestation du Père Jacques (Lucien Bunel) et de trois enfants juifs que l’institution cachait : Jacques Halpern (17 ans), Maurice Schlosser ( 15 ans), Hans-Helmut Michel (13 ans) caché sous le nom de Jean Bonnet, l’ami de Julien dans le film. Sont aussi arrêtés le maire d’Avon, Rémy Dumoncel et le secrétaire de mairie Paul Mathéry (voir photos)
Le Père Jacques Crédits photos, Mairie d’Avon
Le 3 février suivant, les enfants font partie du convoi 67 (environ 1200 personnes) à destination d’Auschwitz. Le Père Jacques est déporté à Neue Breme puis à Mauthausen Güsen. Il connaît la joie de savoir que la liberté est retrouvée mais meurt d’épuisement à Linz le 2 juin 1945.
Rémy Dumoncel Crédits photos, Mairie d’Avon Il est déporté au camp de concentration de Neuengamme où il décède le 15 mars 1945Paul Mathéry Crédits photos Mairie d’Avon Il est déporté au camp de Mauthausen où il décède en Août 1944
Profitant du “déconfinement” partiel, un hommage a été rendu le 2 juin dernier sur la tombe du Père Jacques, dans le couvent des Carmes, en présence d’une douzaine de carmes, de Mme le Maire d’Avon, de trois élus et de Maryvonne Braunschweig, Présidente de l’AFMD 77 et auteure d’articles et de livres sur les “déportés d’Avon“.
Mémorial du Père Jacques Crédits photos Mémorial Couvent des CarmesCérémonie du 2 juin 2020 sur la tombe du Père Jacques Crédits photos Mairie d’Avon
Avon, commune membre du réseau « Villes et Villages des Justes de France »…Extrait dusite de la mairie d’Avon
Deux
autres Avonnais ont été reconnus, à titre posthume, « Justes parmi les
nations » pour avoir aidé, aux côtés du Père Jacques, des Juifs persécutés
par l’occupant nazi et le gouvernement de Vichy, durant la Seconde Guerre
mondiale : Rémy Dumoncel, maire d’Avon et Paul Mathéry, secrétaire de
mairie.
C’est à ce titre que la ville d’Avon fait partie du réseau « Villes et Villages des Justes de France ». Elle contribue, avec le soutien du Comité français pour Yad Vashem, à entretenir le souvenir et les valeurs portées par les « Justes parmi les Nations ». Dans cet objectif, en juin 2015, à l’occasion du 70eanniversaire de la Libération, la ville d’Avon inaugurait la rue « des Justes »en leur honneur.
Des remerciements particuliers au Cercle d’Etude de la déportation et de la Shoah qui nous a fait part de cet hommage et nous a permis de mieux connaître le Père Jacques et la réalité de ce mois de Janvier 1944. Voir leur article ICI
Une ville, un site, deux noms, deux moments différents d’une même entité: Oranienburg-Sachsenhausen.
Un camp de détention préventive est ouvert en mars
1933, à une trentaine de km au nord de Berlin et placé sous l’autorité des
Sections d’Assaut (Sturmabteilung,
SA), formation paramilitaire créée en 1921 : ils font régner la terreur parmi
les détenus « politiques », anti-nazis, et tous solidaires.
L’élimination des SA par les SS en juin 1934 (« Nuit des longs couteaux ») conduit à la fermeture du camp qui a vu passer plus de 3 000 détenus allemands entre mars 1933 et juillet 1934. Ils sont transférés au camp de Lichtenburg. (Mémoire Vivante, FMD n° 34)
Theodor Eicke, commandant du camp de Dachau, a joué un rôle important dans l’élimination des SA. Il est alors nommé Inspecteur général des Camps de concentration (IKL) en juillet 1934. Il a sous ses ordres 5 bataillons de SS formés pour la garde des camps de concentration. Oranienburg étant inadapté à leur formation, il décide la création d’un camp à Sachsenhausen. La proximité de Berlin- est un critère du choix, pour des raisons administratives – la capitale est à 30 km – et économiques – usines d’armements et lieu d’extraction des pierres de construction des futurs bâtiments élevés à la gloire du régime – Berlin doit devenir la capitale du monde germanique, la « Germania ». Ce futur camp, à l’architecture « innovante », doit inspirer les réalisations de camps futurs, en particulier le demi-cercle inscrit dans un triangle qui permet une surveillance optimum d’un nombre optimum de détenus avec un minimum de gardes (Mémoire Vivante n° 34).
Le triangle du camp en 2013, vue aérienne ( Crédits photos Gedenkstaette)
Le camp de Sachsenhausen est un triangle d’environ 600 m de côté, entouré d’un réseau de barbelés, entrecoupé de tours de garde. La partie supérieure du terrain forme le camp des prisonniers. Les baraques des détenus sont disposées en demi-cercle. La partie inférieure est réservée à la Kommandantur, à la garnison SS et à ses différents services. La grille en fer forgé du portail est ornée de l’habituelle inscription des camps nazis: « Arbeit macht frei » (le travail rend libre). Source site de l’Amicale de Sachsenhausen et, pour aller plus loin, voir le site
La cadence de travail des détenus envoyés du camp d’Esterwegen, près de la frontière hollandaise, pour cette construction fait que, commencé en juillet 1936, le triangle de 31 ha est déboisé et entouré de barbelés en trois mois. Bâtiments administratifs, militaires, casernes, chenil de dressage des chiens de garde des camps de concentration, usines d’armements, poste émetteur radio…, avec l’Inspection générale des Camps de concentration (IKL )…, c’est toute une cité SS qui est construite, comme une « unité absolue ».
Le complexe de Oranienburg-Sachsenhausen : Il est à la fois un camp de concentration classique, un centre de formation et d’expérimentation pour l’IKL, l’autorité administrative de tous les camps de concentration, un centre d’opérations secrètes pour les SS. (source et légende sur le site de l’Amicale de Sachsenhausen).
Avec
le complexe Oranienburg-Sachsenhausen, on est au cœur du système
concentrationnaire.
Prévu par un architecte SS sur la planche à dessin, le système, qui a été conçu comme un camp de concentration idéal, était destiné à donner l’expression architecturale de la vision du monde SS et les prisonniers également soumis symboliquement à la puissance absolue des SS. (Gedenkstaette)
Rouleau de comptage, au premier plan, la mitrailleuse sur la tour A, photo propagande SS, février 1941 Crédits photos Gedenkstaette Une seule mitrailleuse installée au sommet de la tour d’entrée contrôle la totalité de la surface du camp, des miradors aux angles achèvent le système de contrôle (source et compléments, Amicale de Sachsenhausen)
Les « actions spéciales » à Sachsenhausen :plusieurs d’entre elles sont tristement « célèbres » : elles ont coûté la vie à des détenus.
L’attaque
simulée contre l’émetteur de la radio allemande de Gleiwitz avec l’objectif de convaincre l’état-major de
la Wehrmacht hésitant d’envahir la Pologne.
Les SS de Sachsenhausen simulent une attaque « polonaise » contre l’émetteur de la radio allemande de Gleiwitz, ville frontière avec la Pologne. Les (faux) soldats « polonais » du (faux) attentat sont des détenus tués par balle auparavant pour simuler l’attaque le 31 août 1939. Le lendemain, la Wehrmacht envahit la Pologne, Hitler accusant les troupes polonaise de violation de la frontière allemande à Gleiwitz.
Le Kommando des faux monnayeurs
Le but est de désorganiser l’économie anglaise par la production de faux billets de livres sterling. C’est à Sachsenhausen, en 1942, que se fait l’impression dans les Blocks 18 et 19 par des détenus mis au secret le plus total. Promis à une mort programmée, ils seront sauvés de justesse en 1945 par les Alliés dans la région d’Ebensee en Autriche.
Livre sterling éditée à Sachsenhausen On estime à environ 150 millions de livres sterling la « production » de l’imprimerie de Sachsenhausen. La précision est telle que les billets sont authentifiés par les autorités bancaires britanniques. L’imprimerie édite aussi de faux papiers (Source et crédits photos: FMD,Mémoire vivante n° 34)
On peut trouver d’autres exemples de ces actions secrètes montées depuis le camp de Sachsenhausen sur le site de l’Amicale, en particulier la dernière d’entre elles, en décembre 1944, pendant l’offensive allemande des Ardennes. Des « éléments » déguisés en soldats américains et anglais ont été infiltrés à l’arrière des troupes alliées pour créer des diversions avec des chars capturés en Normandie et remis en état dans un Kommando de Sachsenhausen.
Les crimes commis par les nazis à Sachsenhausen
Mémoire vivante donne le cas du massacre de 18 000
prisonniers de guerre soviétiques en 1941 comme étant une page parmi les
plus noires de l’histoire de Sachsenhausen.
Est organisée à Oranienburg la « méthode » nouvelle dite de « balle dans la nuque » qui permet l’assassinat plus rapide des victimes. On estime à 10 000, le nombre de prisonniers de guerre soviétiques massacrés à Sachsenhausen, en violation des lois de la guerre, 3 000 autres étant morts pour d’autres raisons ou par d’autres méthodes. (source, Mémoire vivante).
Les Français et la résistance à Sachsenhausen :la tragédie du 11 octobre 1944
La solidarité et la
résistance, même difficile et limitée (sous forme de sabotage en particulier), continuent
malgré les risques car beaucoup ont payé de leur vie le soutien à d’autres
détenus. Au printemps 1944 une commission spéciale formée par les SS et la
Gestapo enquête au camp. Des centaines de détenus sont arrêtés et torturés. Le 11 octobre 1944, 27 d’entre eux sont
fusillés, dont 3 Français : André Bergeron, Benoît Marceau et Emile Robinet.
Le texte prononcé en octobre 2010 par Roger Bordage, pour la commémoration de cette tragédie, est sur le site de l’Amicale, (onglet “plaques commémoratives).
La fille de André Bergeron lui rend hommage. Elle lui a consacré une biographie, consultableICI ( crédits Photos, Amicale de Sachsenhausen).
Le camp et les Kommandos
Conçu pour 8 à 10 000 détenus, ils seront jusqu’’à 35 000 à la fin de la guerre, sans compter les détenus dispersés dans plus de 60 Kommandos extérieurs. La Fondation pour la Mémoire de la Déportation (FMD) pense que, à partir de 1942, « plus de 100 satellites et camps satellites ont été installés au cours du déploiement massif des internés des camps de concentration en tant que travailleurs forcés dans l’industrie de l’armement. Ces camps étaient situés à proximité d’usines d’armes telles que les usines d’avions Heinkel à Oranienburg ou à côté d’usines d’armes de Berlin telles que celles d’AEG et de Siemens ».
Combien de détenus sont-ils passés par ce camp ? Le nombre exact est inconnu ; le site de l’Amicale de Sachsenhausen évoque le nombre de 134 794, de septembre 1939 (début de la numérotation continue) à février 1945, mais combien de victimes avant cette date, combien non recensées arrivées après, combien envoyées par la Gestapo et exécutées directement à la station « Z » (la tour « A » étant la porte d’entrée et la station « Z » la chambre à gaz, l’« étape ultime » Mémoire vivante) ? L’Amicale évoque également le cas des femmes envoyées de Ravensbrück, aux matricules 1 à 8 000, enregistrées administrativement à Sachsenhausen avant d’être envoyées dans des Kommandos extérieurs. La Gedenkstätte donne le chiffre de 200 000 entre 1936 et 1945, 90 % étant des « étrangers » (non allemands), majoritairement des citoyens de l’Union soviétique et de la Pologne, même si plus de 20 nationalités différentes sont représentées. La dernière mise à jour du mémorial de Sachsenhausen parue sur le site de l’Amicale fait état de 9 400 noms de Français
Le Kommando Klinker est d’abord un Kommando disciplinaire sur le site de la briqueterie qui fournit en matériaux les chantiers de Berlin. Les 2 000 détenus (Juifs et Tsiganes surtout) y travaillent toute la journée dans des conditions effroyables. Il devient camp annexe en 1941, spécialisé dans l’industrie de guerre (fabrication de grenades). Il sera évacué les 20 et 21 avril 1945 après le bombardement allié du 10 avril qui fait de nombreuses victimes parmi les détenus. Voir plus de renseignements sur ce Kommando et l’exposition qui lui a été consacrée sur le site de la Gedenkstätte
Le Kommando
Heinkel spécialisé dans les
constructions aéronautiques est le plus important des Kommandos et celui qui comporte le plus de Français. À la fin de l’année
1944, devant l’avance des armées alliées et les évacuations des autres camps, ses
effectifs explosent et les derniers mois, les plus terribles, se terminent par
les « marches de la mort ».
10 000 femmes venues principalement de Ravensbrück ont été immatriculées à Sachsenhausen avant d’être envoyées dans divers Kommandos. (source Mémoire vivante qui donne d’autres exemples de Kommandos)
Les évacuations
Transferts et évacuations depuis Sachsenhausen Crédits photos FMD
Le complexe de Sachsenhausen comptait 58 000 détenus fin janvier 1945. En janvier et février, 20 000 détenus furent évacués vers Bergen-Belsen, Mittelbau-Dora, Mauthausen, Ohrdruf (Kommando de Buchenwald) et d’autres camps.
Peu avant l’évacuation finale, un convoi de la
Croix-Rouge suédoise est autorisé à emmener 2 300 Norvégiens et Danois
jusqu’à Neuengamme d’où, avec 1 200 de leurs compatriotes de Neuengamme,
ils sont acheminés en Suède.
La marche des déportésdepuis le camp jusqu’à la forêt de Below
L’ordre d’évacuation est donné le 18 avril. Formés en groupes de 500, les détenus sont mis en route vers le nord-ouest dans la nuit du 20 au 21 avril. Les premiers groupes arrivent le 23 avril à Wittstock. Quelques kilomètres au nord, les gardes font entrer 16 000 détenus dans la forêt de Below, pour camper et attendre d’autres colonnes. Des évacuées de Ravensbrück rejoignent la forêt qui abrite près de 40 000 détenus jusqu’au 29 avril, étendus à même le sol, sans eau, sans nourriture, sans vêtements appropriés, mangeant des racines ou de l’herbe pour tromper faim et soif. Un convoi de vivres de la Croix-Rouge distribue des colis de nourriture, peu après l’arrivée des premières colonnes. Les troupes russes libèrent le secteur entre le 1er et le 3 mai 1945. Des milliers de déportés sont morts lors de ces « marches de la mort ».
Stèle évoquant ” la marche de la mort” Crédits photos Mémoriaux de Brandebourg Marchede la mort et camp forestier Gino Pessani 1950 Crédits photos Mémoriaux de Brandebourg « Pour de nombreux survivants du camp de Sachsenhausen, la “marche de la mort” et le camp temporaire dans la forêt de Below sont encore parmi les souvenirs les plus impressionnants de leur emprisonnement. » (extrait site Gedenkstätte)
Au camp central, le 21 avril au soir, les derniers gardes disparaissent. Il restait 3 000 détenus y compris les femmes, dont 2 000 au Revier. Le lendemain 22 avril, l’armée soviétique entre au camp. 30 000 détenus erraient encore sur les routes (FMD). 300 détenus n’ont pas survécu à leur libération. Ils ont été enterrés dans six charniers sur le mur du camp dans la zone de l’infirmerie (Source Gedenkstätte)
Porte d’entrée du camp citation d’un survivant, photo extraite d’un bulletin de l’amicale
Le Mémorial et l’Amicale aujourd’hui
Rappel : Une exposition de 54 panneaux sur le camp de Sachsenhausen a été présentée en janvier à Beaune et le 8 février 2020 à Houppeville, près de Rouen. Voir sur ce blog, la présentation au mois de février (ICI) avec le synopsis consultable. Pour les renseignements pratiques et réserver l’exposition, s’adresser à l’Amicale de Sachsenhausen.
L’exposition à Beaune, Janvier 2020
Les commémorations du 75éme anniversaire de la libération du camp
Au mémorial de la Marche de la mort, dans la forêt de Below, une cérémonie était prévue en mémoire des victimes de cette « marche ». En raison de la crise sanitaire, elle a dû être annulée. Les invités sont restés silencieux un moment puis ont déposé des couronnes et des fleurs au mémorial.
La cérémonie au Mémorial de la forêt de Below, 2 mai 2020 Crédits photos Mémorial
Le site du Mémorial a mis en ligne les cérémonies du 75e anniversaire de la libération du camp, sans invités. On peut écouter les interventions du Directeur du Mémorial, de ses collaborateurs, du président du Comité international de Sachsenhausen et des autorités allemandes, émouvantes dans ce lieu vide, où on n’entend que les chants des oiseaux.
Parmi les vidéos postées sur cette page, le Chant des Marais, dans la baraque 38, ICI; la version allemande s’intitule « Les soldats des marais » (Die Moorsoldaten) .
En conclusion, voici le poème de Viviane Dourlens, lauréate 2013 du prix Maginot de la Mémoire et du civisme, lycée des Pierres Vives dans les Yvelines, composé après sa visite au camp de Sachsenhausen.
Le poéme de V Dourlens Crédits photos Amicale de Sachsenhausen
Quelques extraits de son poème (il est en entier sur le site de l’amicale)
…
Mes pas visitent les pas
d’Autres, Vibrent.
Résonnance d’une mémoire silencieuse
…
Repère orthonormé S’y inscrit
un triangle tranchant d’équité. Points,
Lignes et Figures.
Tant d’empreintes s’animent dans
les allées mortes Dans notre
esprit, dans les livres, Sur l’écran
de notre mémoire collective
Mémoire qui s’efface Mémoire en
feu Mémoire en
cendre Mémoire qui
vit.
…
« Sachso » ou le modèle
idéal Où brûlent
encore les idéaux
…
Phénix échappé de la baraque 38 Comme autant
d’âmes qui s’envolent libres
Viviane Dourlens
Aussi extraordinaire que cela puisse paraître, le site de Sachsenhausen existe encore de nos jours dans sa quasi intégralité. De nombreux bâtiments ont été utilisés depuis la fin de la guerre et sont en relativement bon état, de même que la cité SS (plus de 100 villas). Nulle part ailleurs ne peut être montré dans son intégralité un ensemble qui reflète la structure architecturale d’une cité concentrationnaire. Pour l’histoire, c’est un lieu de mémoire irremplaçable.Site de l’Amicale de Sachsenhausen
Ce camp est le symbole des crimes contre l’Humanité
de l’univers concentrationnaire, au même titre que le camp d’extermination
d’Auschwitz rappelle le génocide du peuple juif.
Dachau est le premier camp de concentration d’État du Reich, créé par Hitler le 22 mars 1933, un mois seulement après son élection comme chancelier. Il est aussi l’avant-dernier camp libéré par les Américains, le 29 avril 1945, la veille de la mort d’Hitler.
Le camp « modèle »
Porte principale du camp de Dachau 1947, source Wikipédia
Dachau connaît d’emblée une publicité extraordinaire, la presse quotidienne rendant compte des nouveaux convois de détenus, arrêtés par la police bavaroise puis gérés par la SS, ces deux organismes ayant comme chef le même homme : Heinrich Himmler. Le camp devient la référence, le modèle, l’école du crime SS, formant à « l’École de la Violence » les futurs cadres et gardiens SS des camps. Il sert de prototype pour les 1 650 camps ultérieurs (infrastructure, organisation, fonctionnement). Source : Amicale de Dachau
Dachau est situé dans une plaine marécageuse d’où on extrait la tourbe, au NO de Munich, dans un site isolé qui convient totalement aux critères recherchés par les nazis, l’isolement et la sécurité. Ouvert en 1933, il regroupe les « éléments considérés comme dangereux pour la sécurité du peuple allemand », des « politiques », ennemis de l’intérieur et adversaires du régime, installés dans des baraquements d’une fabrique d’explosifs désaffectés. Outre ces opposants « politiques » sont aussi emprisonnés des citoyens pour des raisons d’idéologie raciale et « d’hygiène sociale » (homosexuels, Sinté, Roms, juifs après les pogromes de 1938) ou étiquetés « asociaux ».
Déportation d´habitants juifs de Baden-Baden au camp de concentration de Dachau (Archives fédérales allemandes) Source Gedenskätte Dachau
Le camp
Tel que les déportés le connaîtront, il est construit en 1937. Il comprend la zone de détention de sécurité, avec, entre autres, la place d’appel d’une capacité de 40 à 50 000 hommes, les 34 « blocks » dont 2 servent d’infirmerie – le Revier –, le four crématoire, reconstruit en 1939 par des religieux polonais et la zone administrative et fonctionnelle avec les logements des SS, les espaces verts…
Photographie aérienne du camp de concentration de Dachau, 20 avril 1945, Source Gedenkstätte Dachau
Cette photographie aérienne montre le camp de Dachau le 20 avril
1945.
Les différentes couleurs illustrent
les différents secteurs du camp de concentration, chacun avec sa propre
fonction.
La zone verte avec les 34 baraques
disposées symétriquement correspond au camp des détenus.
La zone orange représente l’exploitation agricole que les SS appelaient par euphémisme « le jardin d’herbes aromatiques ». Les détenus durent y effectuer du travail forcé à partir de 1938. Étant données les conditions de travail brutales, les détenus nommèrent ce site « Plantage » (plantation).
Le secteur de la Kommandantur SS est
indiqué en bleu. Le crématoire faisait également partie de cette zone.
La zone jaune correspond au camp de formation SS, dans lequel les SS étaient formés idéologiquement et militairement. C’est là également que se trouvaient les bâtiments administratifs, les logements, les bâtiments de services ainsi que des ateliers où des détenus devaient travailler. Vers la fin de la guerre, le site du camp de Dachau fait plus de deux kilomètres carrés.
Cette photo de 1945 est à comparer avec celle de 2006 qui décrit le site actuel de Dachau
Sur cette photographie aérienne, on aperçoit le site de l’ancien camp de concentration de Dachau. La zone verte montre l’emplacement du mémorial du camp. Le mémorial comprend l’ancien camp des détenus, le site du crématorium et de petites parties de l’ancienne zone de la Kommandantur.
Après 1940, avec la répression des résistants au
nazisme venus de toute l’Europe, le nombre des déportés connait une forte
croissance, les détenus allemands sont minoritaires, moins de 10 %.
Comme dans les autres camps de l’Ouest, l’évacuation
des camps de l’est, commencée en 1944 et poursuivie en 1945, provoque un afflux
de détenus (plus de 84 000 après juin 1944) avec son lot d’aggravations
des conditions de vie (conditions de travail exténuantes, manque d’hygiène,
expériences pseudo-médicales…).
À ces dégradations de conditions de vie s’ajoute l’épidémie
de typhus entre décembre 1944 et mai 1945 due à l’arrivée de détenus venant de
Hongrie et infestés de poux (17 342 décès, et 2 200 après la
libération du camp).
Dachau reçoit plus de 200 000 détenus, dont plus de 14 500 Français. 41 500 y sont morts.
Pour plus d’informations sur le camp jusqu’en 1945, voir la page Gedenkstätte Dachau et pour s’informer plus précisément sur le camp de 1933 à 1945, on voir le site de l’Amicale de Dachau
Les camps extérieurs (Kommandos)
Le camp de Dachau disposait, principalement dans le sud de la Bavière, d’un vaste réseau de 140 camps extérieurs au total, comme en témoigne la carte ci-dessous :
Les prisonniers sont contraints de travailler principalement dans le secteur des armements aériens. Un déploiement sur un site extérieur, en particulier dans les détails des travaux de construction, équivalait à « l’extermination par le travail ». (” Le travail rend libre“) (!)
En 1944, alors que les raids aériens alliés infligent de plus en plus de dégâts et entravent gravement la production d’armements, le ministère des Armements construit des sites de fabrication souterrains à l’épreuve des bombes, en particulier dans les Kommandos de Mühldorf et Landsberg-Kaufering. Plus de 30 000 prisonniers y ont enduré des conditions de travail et d’emprisonnement meurtriers ; plus d’un tiers d’entre eux n’ont pas survécu (source Gedenkstätte)
L’organisation clandestine
Comme dans d’autres camps, une organisation
clandestine se constitue à Dachau.
Initiée par des communistes allemands, elle s’internationalise
et se diversifie par la suite. D’autres nationalités et d’autres tendances
politiques (chrétiens démocrates, socialistes, etc.) s’unissent et un Comité
international se crée. Chaque groupe national a sa direction clandestine.
Malgré la surveillance des SS et de leurs agents de renseignements, solidarité et résistance tiennent bon chez les déportés : actions spectaculaires (défilé du 14 juillet 1944 par les Français se rendant à l’appel, refus collectif d’obéissance le 4 septembre 1944 à l’appel après l’annonce de l’exécution prévue de 92 officiers soviétiques), solidarité quotidienne (nourriture récupérée pour les plus faibles) et sabotage (source Mémoire vivante n° 33).
En avril 1945, lorsque l’ordre de ne pas laisser un détenu tomber vivant entre les mains ennemies est connu du Comité international, des groupes de combat se créent au sein des Kommandos de travail ainsi que des groupes de sécurité dans les Blocks afin de prévenir toute provocation. Des documents ou copie de documents ont réussi à être mis à l’abri lorsque les SS, pressentant la défaite, commencent à détruire archives et documents compromettants pour effacer les traces de leurs crimes. Quelques membres du Comité international préparent en secret la mise en place d’une direction nouvelle et d’une police interne pour le moment où les SS disparaîtront. (Source FMD).
Les évacuations
Au camp de Dachau, l’ordre d’évacuation générale est donné le 28 avril au matin. En fin de soirée, un Comité international est instauré pour maintenir l’ordre. Il impose des laissez-passer pour contrôler les déplacements, tout relâchement de la discipline pouvant tourner au désastre. Le 29 avril, vers midi, une unité de la 45e division d’infanterie américaine atteint le camp en longeant la voie ferrée et tombe sur le train de Buchenwald.
Le train de la mort de Buchenwald-Dachau
Parti le 7 avril de Buchenwald pour Flossenbürg avec 4 480 détenus, ce train de 39 wagons est dérouté vers Dachau, en raison de l’avance américaine. Le 29, les soldats découvrent ce train stationné à proximité du camp, rempli de cadavres. Seuls les vivants sont rentrés dans le camp, les morts ont été laissés sur place. Ce « train de la mort » devient un des symboles de la barbarie nazie.
Des soldats de la 45e division d’infanterie américaine sont chargés d’encadrer de jeunes garçons de la Jeunesse hitlérienne obligés de regarder les cadavres de déportés entassés dans un wagon près du camp de Dachau, avant leur inhumation 30 avril 1945 Source :site Canopé
Peu après cette macabre découverte, un détachement de la 42e division d’infanterie pénètre dans le camp et désarme les gardes. Des milliers de détenus enfin libres sortent acclamer leurs libérateurs.
Mais le sort de milliers d’autres de leurs camarades des Kommandos extérieurs et camps annexes, demeure incertain. Le Kommando d’Allach (créé en 1943 à l’ouest de Munich, il travaillait au profit des usines d’aviation de la firme BMW et incluait également une fabrique de porcelaine; il a compté jusqu’à 10 000 détenus) vit, comme beaucoup d’autres, des instants d’angoisse extrême sur la conduite finale des SS avant d’être libéré le 30 avril 1945.
Le site commémoratif de 1965 à aujourd’hui
Dès 1955, le Comité International de Dachau est constitué, et 10 ans après, le site commémoratif du camp ouvre ses portes et présente une exposition. La nouvelle, inaugurée en 2003, permet de suivre le « chemin des déportés » de leur arrivée au camp, pendant leur détention et jusqu’à leur libération. D’autres expositions permanentes sont visibles. Voir le site Gedenkstätte Dachau
En 2020, la cérémonie de commémoration du 75e anniversaire de sa libération, qui devait accueillir plus de 2 000 personnes a été annulée, comme celles des autres camps et comme toutes les commémorations prévues pour cet anniversaire. Ce fut une décision « particulièrement difficile pour toutes les parties concernées en raison de son importance et de celle que l’événement revêt pour tant de personnes » (Source, site Gedenkstätte Dachau).
Cependant, cet anniversaire n’a pas été oublié : “2 cérémonies virtuelles” se sont déroulées à Dachau.
-le 29 avril, jour anniversaire de la libération avec les autorités bavaroises ( voir cette cérémonie ICI)
Comme pour les autres camps de concentration, les cérémonies prévues à Flossenbürg pour le 75éme anniversaire de sa découverte ont été annulées. Mais nous continuons, à notre façon, de rendre hommage à celles et ceux qui, “par leur esprit de résistance, leur volonté et leur profond attachement à préserver leur dignité, ont surmonté des conditions inhumaines malgré la présence et la menace permanentes de la mort…. De tout cela, rien ne doit être oublié….” (Message de la Journée nationale du souvenir des victimes et des héros de la déportation, 26 avril 2020)
“Rien ne doit être oublié” pour celles et ceux qui ont été les victimes de cette idéologie meurtrière, mais aussi par nous, les générations suivantes.
A “l’occasion du 75éme anniversaire de la libération du camp de Flossenbürg”, le Consulat général de France à Munich a déposé une gerbe pour, dit son communiqué, rendre ” hommage aux déportés et victimes de la barbarie nazie internés dans ce camp, parmi lesquels figurent 5 000 de nos compatriotes”
Gerbe du Consulat général de France à Munich 27 avril Photo: Ministère de l’Europe et des affaires étrangères
« Flossenbürg ressemble à une ville de barbelés et de briques, aux abords de la carrière de granit. L’alignement des baraques, étagées sur la colline, reflète parfaitement l’esprit de la planète concentrationnaire : les déportés n’y sont plus que des matricules, inscrits à même la peau. Chacun d’entre eux doit se plier à la méthodique entreprise de déshumanisation nazie. Un déporté qui tombe, c’est un simple chiffre en moins. Le poteau des pendaisons publiques est dressé pour l’exemple, commun rappel constant de la précarité de la vie. Sous-hommes traités en sous-hommes, il faut pour les détenus trouver dans la fraternité aléatoire des baraques un soutien, un ami, un regard humain, un geste, en fait quelque chose qui aide à tenir et à subir. A la libération (…) Le malheur s’arrête. Mais les cauchemars et les souvenirs commencent. » Source Mémoire et Vigilance n° 36, janvier 2003
Pour mieux connaître ce camp “oublié”, l’Amicale de Flossenbürg nous propose le texte de Robert Deneri, ancien président de l’association de Flossenbürg de 1996 à 2001, déporté à Sachsenhausen puis à Flossenbürg (Matricule n° 45623). En une page, il évoque ce camp, de ses origines à sa libération au mois d’avril 1945.
Des compléments à ce document permettront à nos lecteurs de mieux connaître ce camp, afin qu’il ne soit plus “oublié”. Les extraits du textedeRobert Deneri seront indiqués en italique
Le camp de Flossenbürg, un parmi de nombreux autres
En Allemagne, le camp se situe dans “le Haut-Palatinat bavarois, près de la frontière, à 800 mètres d’altitude au cœur d’une forêt dans l’Oberpfalz tchèque
Le choix de ce lieu correspond aux critères recherchés par les SS: isolement et éloignement des voies de communication, exploitation du granit (voir ci-dessous) qui permet de participer aux grands travaux prévus par le régime nazi, à l’industrie allemande, et à l’effort de guerre, sans frais de main d’œuvre !
Les kommandos extérieurs sont nombreux: 95 kommandos, dont 69 en Allemagne et 26 en Thécoslovaquie [ République tchèque aujourd’hui, NDLR]. Ils sont créés après 1942, lorsque les détenus sont mis au travail pour alimenter l’industrie de guerre. Selon l’Amicale de Flossenbürg, 47 kommandos (9 de femmes et 35 d’hommes) auraient accueilli des Français.
Les camps satellites; voir la liste sur le site Mémoire des Déportations “le camp de concentration de Flossenbürg devient à partir de 1942 la centrale d’un système concentrationnaire largement ramifié” KZ-Gedenksätte Flosse,nbürg
“Le travail imposé tourne toujours autour de deux grands axes: d’une part l’industrie de l’armement, et en particulier de l’aéronautique avec des usines Messerchmitt, et d’autre part les travaux du sol dans les carrières de granit, le forage de tunnels et d’usines souterraines“.
La Gedenskätte de Flossenbürg surnomme la ville: la localité du granit ” en raison de ses gisements de granit, de nombreuses carrières y sont mises en œuvre à partir de la fin du XIXème siècle.
Ouvrier-carrier sur la colline du château-fort 1896 Source KZ-Gedenskätte-Flossenbürg
Cette carrière, distante d’environ 300 mètres du camp, comportait les fronts d’extraction proprement dits et une entreprise attenante où le matériau était transformé en pierre de taille.
Dans cette carrière, les accidents sont à l’ordre du jour. Le froid, le travail exténuant, la nourriture totalement insuffisante et la violence arbitraire des SS mènent à la mort de nombreux détenus. Source :Mémoire et Vigilance, n° 36, janvier 2003
La photo suivante (sur laquelle on voit la carrière) ne doit cependant pas faire illusion, quant au quotidien des détenus. Elle date de 1942, et, de plus, est prise par un SS.
Appel pour le repas 1942 Source KZ-Gedenskätte -Flossenbürg
Les conditions de vie (de survie?) se sont détériorées au fur et à mesure de l’avancée de la guerre, surtout après 1943. Pour la plupart des détenus, la question déterminante est “comment vais-je arriver à survivre demain?” (Source KZ-Gedenskätte-Flosssenbürg)
C’est
dans les Kommandos de Hersbruck, de Johanngeorgenstadt et de Leitmeritz que les
taux de décès sont les plus importants parmi les Français avec respectivement
74, 59 et 55 %.
Au total, on estime à 84 000 hommes et 16 000 femmes originaires de plus de 30 pays, le nombre d’internés à Flossenbürg, entre 1938 et 1945 (Source KZ-Gedenskätte-Flosssenbürg). Robert Deneri évoque 5344, dont 965 femmes, le nombre de Français passés par ce camp avant avril 1945
Les évacuations
En mars 1945 près de 53 000 prisonniers étaient détenus à Flossenbürg, dont 14 500 dans le camp principal.
En
outre, en avril 1945, des milliers de déportés évacués d’autres camps, en
particulier de Buchenwald, arrivent à Flossenbürg, entre deux « marches de la
mort », sans y être immatriculés…
…Le 20 avril 1945, alors que les troupes alliées approchent, le camp est évacué en quatre colonnes qui comprennent au total 14 800 détenus, dont l’une atteint Dachau. Lors de marches forcées d’environ 80 km, 7 000 périssent alors que les survivants sont libérés le 23 avril 1945 sur la route de Cham (Cham est à environ 80 km de Flossenbürg [NDLR]) par une colonne blindée américaine, tandis qu’une autre libérait le camp lui-même le même jour
Les évacuations : La moitié des détenus envoyés sur ces “routes de la mort” périt, ce qui correspond au rythme effarant d’un mort d’épuisement ou par balle toutes les 35 secondes ! (Source FMD)
Max Kögel, commandant du camp lança entre 25000 et
30000 déportés dans les marches de la mort, du 15 au 20 avril 1945. Un premier
convoi, de Juifs, arrivé de Buchenwald fut envoyé à Theresienstadt, tandis que
quatre colonnes principales furent dirigées à pied vers Dachau: une seule
atteint son but, les autres errèrent jusqu’à leur rencontre avec les Alliés.
Les évacuations de Flossenbürg illustraient l’impasse d’une situation qui n’en finissait pas de finir. Dans les sites reculés, les gardes ne montrèrent aucun scrupule à liquider les détenus qui n’étaient plus capables de se remettre en marche et, lorsque la progression se trouva définitivement bloquée, ils eurent à choisir entre massacrer les détenus et fuir, ou abandonner leurs prisonniers en disparaissant. Le hasard, ou la personnalité d’un SS a fait la différence. (Source FMD)
Le 23 avril, lorsque les membres du 358 ème et du 359 ème régiments d’infanterie américains libérèrent Flossenbürg, un peu plus de 1 500 détenus restaient dans le camp. Environ 200 moururent après la libération.(Chiffres, Source Encyclopédie Multimédia de la Shoah Les détenu(e)s des Kommandos de Rabstein et Zwodau sont libéré(e)s par les Soviétiques le 8 mai. ( Mémoire et Vigilance, n° 36, janvier 2003)
Un terrible bilan humain
Durant les sept années de son existence, plus de 100 000 détenus furent internés au camp de concentration de Flossenbürg et ses Kommandos, parmi eux plus de 5200 Français et Françaises. Plus de 30 000 personnes sont mortes dans le complexe du camp de Flossenbürg à cause d’assassinats ciblés, de conditions de vie catastrophiques et de l’enfer des marches de la mort. Le nombre de personnes assassinées et décédées dans le camp principal devrait se situer entre 13 000 et 15000. Plus de 10 000 hommes et femmes sont morts dans les Kommandos. Il est impossible de chiffrer, avec exactitude le nombre des victimes des marches vers la mort, mais il dépasse probablement 8000. (Source, site de l’Association de Flossenbürg )
Le bilan en pertes humaines des déportés français est très lourd : environ 60% . La Fondation pour la Mémoire de la déportation explique ce chiffre élevé par le fait que, d’une part, la plupart d’entre eux vient d’un autre camp, Buchenwald, Dachau, voire de prisons, et l’état sanitaire général est déjà très altéré et que, d’autre part, les Français n’ont jamais détenu de position clé dans la hiérarchie interne déléguée par les SS aux détenus. Ils sont donc envoyés dans les Kommandos les plus durs comme celui d’Hersbruck où la mortalité dépasse 73%,ou à la carrière de granit, ou encore au creusement des galeries de Leitmeritz. (SourceMémoire et Vigilance, n° 36, janvier 2003)
75 ans après…
Un mémorial avec une stèle portant les noms de déportés morts à Flossenbürg a été érigé après la guerre à la demande des associations. Il accueille chaque année les cérémonies du souvenir à la mémoire des morts à l’occasion du pèlerinage qui a lieu au mois de Juillet.
Pèlerinage de Juillet 1980. Porte-drapeau, Laurent Alibert et Marcel Burtin. Ce dernier a été interné au Struthof, transféré à Buchenwald, puis à Flossenbürg au kommando de Janovice (république tchèque aujourd’hui) Mle 1429 Photo Association de Flossenbürg
Le terrain sur lequel était implanté Flossenbürg
ayant été « privatisé » après guerre, il ne subsiste plus du camp que quelques
vestiges comme le crématoire, une partie du « Bunker » aménagée en musée et une
chapelle construite postérieurement.…
Ce patrimoine a été rendu à la Fondation des mémoriaux, mais une autre partie du camp reste propriété communale et sa récupération se heurte à des obstacles liés au droit des communes allemandes. Un lotissement desservi par une route communale a été construit sur les terrasses des anciennes baraques. La route dissocie l’espace entre la Kommandantur et la place d’appel : des démarches sont faites régulièrement pour obtenir la réintégration de ce domaine au patrimoine de la Fondation allemande…. Dossier suivi par l’Amicale de Flossenbürg… (Source Mémoire et Vigilance, n° 36, janvier 2003)
Site internet de l’Association de Flossenbürg
Après plusieurs mois de développement, l’association de Flossenbürg vous informe de l’ouverture de son nouveau site internet : ICI
Mot du
Président de l’Association à cette occasion:
“Depuis
sa création en 1945, il y a maintenant 75 ans, l’Association des déportés et
Familles des disparus du camp de Concentration de FLOSSENBÜRG et Kommandos, n’a
cessé d’accumuler et de diffuser des informations et des connaissances afin de
préserver et de transmettre l’histoire du camp et la mémoire des déportés.
Ce
nouveau site permet aux familles des
déporté.e.s de trouver ou de transmettre des informations liées à l’histoire de
ces dernier.ère.s.
Il
permet aux enseignants et à leurs élèves de compléter les livres d’histoire,
par des témoignages, dont la portée émotionnelle engendre l’échange et la
réflexion collective.
Il permet de créer du lien entre toutes
les générations et d’inviter les plus jeunes à relayer ces informations.
Nous souhaitons qu’il permette de tisser
des liens avec d’autres associations, d’autres nationalités, en relayant,
nous-mêmes, leurs informations.
Nous vous invitons à le consulter
régulièrement, car de nouveaux documents vont être intégrés, de nouvelles
interviews sont en cours.
Nous vous souhaitons une bonne visite sur notre site”.
F. Hernandez, Président de l’Association des Déportés et familles des Disparus du Camp de Concentration de Flossenbürg et Kommandos
Merci à l’Association de Flossenbürg pour son aide et le partage de ses documents
« …60 ans que nos nuits sont visitées. Visitées par les souvenirs de ce que j’appelle “là-bas”, c’est-à-dire, le monde du Mal Absolu ».
Ces mots sont extraits de l’ouvrage de Francine Christophe Le Pêle-Mêle (p. 62, chapitre 14, sous le titre : « Ce qu’était Bergen-Belsen »). « Là-bas », c’est Bergen-Belsen, découvert le 15 avril 1945 par les Britanniques.
« Une grande route centrale et, de chaque côté, des enclos séparés par des barbelés. Des baraques dans chaque enclos. » (Francine Christophe, Une petite file privilégiée Ed. L’Harmattan p 71 chap. Bergen-Belsen)
Ce plan et la légende qui l’accompagne résument à eux seuls l’histoire complexe de ce camp qui a connu divers statuts jusqu’à celui de « mouroir », terme non officiel du vocabulaire nazi, mais reflet de la réalité. Plusieurs aspects de la Seconde Guerre mondiale et de la politique national-socialiste de persécution et d’anéantissement se retrouvent ainsi dans l’histoire des différents camps situés à Bergen-Belsen. Extrait du site
Le Plan du camp avec l’échelle donne aussi une idée de la complexité du camp ou, plutôt des différents camps . Voir ce plan en suivant ce lien Source
L’histoire de Bergen-Belsen est tout aussi complexe que son plan comme le prouve cette page du site ” Mémoire des Déportations” qui met en parallèle la Seconde Guerre mondiale et ses besoins en armements, la politique national-socialiste de persécution et d’anéantissement qui « se retrouvent ainsi dans l’histoire des différents camps situés à Bergen-Belsen”… Lequel, sans être « un camp d’extermination ou un lieu d’exécutions massives par fusillades … est un camp où les détenus meurent suite à la négligence systématique, à l’arbitraire et aux violences des SS. » Source
À partir de décembre 1944, Bergen-Belsen est la destination des convois d’évacuation. Ils convergent alors d’un peu partout vers ce camp qui devient « l’épicentre des évacuations » de détenus. Ces rescapés des « marches de la mort » arrivent à pied des annexes de Neuengamme, ou par convois de Dora-Mittelbau, Buchenwald, Sachsenhausen, Flossenbürg et même Leonberg, une annexe de Natzweiler. On a pu parler à propos des envois à Bergen-Belsen « d’épurations avant évacuations ». (FMD)
Augmentation des effectifs des détenus à Bergen-Belsen. (Chiffres Fmd)
Décembre
1944 :
environ
15 000
1er
février 1945 :
environ
22 000
1er
mars 1945 :
environ
41 520
On comprend la faim, les épidémies et la surmortalité qui s’accroît après février 1945 avec l’arrivée du typhus, d’autant plus que les nazis nourrissent l’épidémie avec l’arrivée de nouveaux convois.
En mars 1945, 18 500 décès sont dénombrés à Bergen-Belsen. Il n’y a plus d’eau, plus de nourriture; le crématoire ne suffit plus à brûler les morts, les cadavres s’entassent à même le sol et dans les baraques.
Évacuations et libérations
À partir du 6 avril, les « juifs d’échange » sont évacués par 3 convois vers Theresienstadt ; un y arrive, les deux autres sont libérés en cours de route par les Américains à Magdebourg, l’autre, le « transport perdu » est libéré par les Soviétiques près de Tröbitz, en Saxe, le 23 avril, après 3 semaines d’errance. C’est dans ce train convoi que se trouvaient Francine Christophe et sa mère, atteinte du typhus, ainsi que le bébé né à Bergen-Belsen et sa mère.
Bergen-Belsen après le 15 avril 1945
Après pourparlers et négociations, le camp est remis aux autorités militaires britanniques le 15 avril.
Kramer, prisonnier des Britanniques Source Canopé , CNRD “les fers aux pieds, le bourreau est sous bonne garde” Mémoires de guerre Lorsque Joseph Kramer prend ses fonctions de commandant du camp de concentration de Bergen-Belsen, les conditions d’existence des “Juifs d’échange” commencent à ressembler au régime concentrationnaire. Avec les Kapos, détenus chargés de certaines fonctions par la SS, et les “souris grises”, les surveillantes, les conditions d’existence, précaires dès la création du camp, se dégradent de plus en plus. Source FMD En complément sur les témoignages et les photos prises par les libérateurs, voir un article de Télérama qui, bien qu’il soit de 2015, garde toute son actualité quant aux questions que se posaient les photoreporters confrontés à l’horreur ” comment photographier l’extermination de masse ? L’article est ICI en suivant ce lien
Ce que les Britanniques trouvent remplit la presse mondiale : « 55 000 loques humaines et 10 000 cadavres non-inhumés ».
Il leur est impossible de juguler la mortalité. 15 000 personnes meurent encore avant la fin du mois de juin. Le 21 mai 1945, les baraques sont brûlées pour empêcher la diffusion de l’épidémie. Les derniers survivants sont évacués à la fin du mois de mai à cause de la quarantaine.
Source FMD Le camp de Bergen-Belsen avait disparu de la surface de la terre. Seules sont restées les fosses communes dans la lande qui rappellent à tous ce qui s’est passé à Bergen-Belsen. Extrait de Eberhard Kolb, Bergen-Belsen.Du « camp d’hébergement » au camp de concentration 1943-1945, Vandenhoeck und Ruprecht, 1985, pages 46-51 (traduction de l’allemand par Françoise Manfrass) Source Canopé
Parmi les 120 000 détenus à Bergen-Belsen, on estime à 50 000 le nombre de morts, de faim, de maladies et de violences. 3 000 enfants de moins de 15 ans ont été internés à Bergen-Belsen, 500 âgés de 18 mois à 15 ans survivaient à la libération. Source
La solidarité pendant la détention et après la libération